Michel Foucault

  • Ethique de l'authenticité - Nominalisme - Il n'y a que l'individu, pas d'universel

La recherche de styles d'existence aussi différents que possibles les uns des autres me paraît l'un des points par lesquels la recherche contemporaine a pu s'inaugurer autrefois dans des groupes singuliers. La recherche d'une forme de morale qui serait acceptable par tout le monde - en ce sens que tout le monde devrait s'y soumettre - me paraît catastrophique. (...)

- Dans la mesure où vous n'affirmez aucune vérité universelle, où vous levez des paradoxes dans la pensée et où vous faites de la philosophie une question permanente, êtes-vous un penseur sceptique ?

- Absolument. La seule chose que je n'accepterai pas dans le programme sceptique, c'est la tentative que les sceptiques ont faite de parvenir à un certain nombre de résultats dans un ordre donné car le scepticisme n'a jamais été un scepticisme total ! Il a essayé de lever des problèmes dans des champs donnés, puis de faire valoir à l'intérieur d'autres champs des notions effectivement considérées comme valables ; deuxièmement, il me semble bien que, pour les sceptiques, l'idéal était d'être des optimistes sachant relativement peu de chose, mais les sachant de façon sûre et imprescriptible, alors que, ce que je voudrais faire, c'est un usage de la philosophie qui permette de limiter les domaines de savoir.


« Le retour de la morale » (entretien avec G. Barbedette et A. Scala, 29 mai 1984), Les Nouvelles littéraires, no 2937, 28 juin-5 juillet 1984, pp. 36-41.

Dits Ecrits tome IV texte n°354

Cité à charge par Luc Ferry, in Sagesses d'hier et d'aujourd'hui, 2014, PDFWeb, p. 698

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Servais Pinkaers - Les anciens ont dit bien des choses mieux que nous

... Au cours de ce travail de rénovation de la théologie morale, nous nous apercevrons souvent que nos pères avaient déjà dit bien des choses qui nous paraissent neuves, qu’ils les avaient exprimées mieux que nous ne pourrions le faire. Nous redécouvrirons alors le sens véritable des textes anciens que nous n’avons pas compris parce que leur mode de pensée et leur langage n’étaient pas les nôtres, du fait de leur appartenance à une culture que nous avons tendance à considérer comme morte. Mais si nous apprenons ce qu’on peut appeler la commune mesure de toute pensée chrétienne, sa dimension surnaturelle, nous pourrons percevoir le sens profond des textes chrétiens en saisissant, à partir des mots d’autrefois, la signification vivante que leur conféraient les anciens.

Dans cette perspective, il nous paraît que le modèle qui s’impose à la théologie morale est encore saint Thomas d’Aquin, et notamment sa Somme de Théologie. La puissante structure de cette œuvre, l’étonnante pénétration de ses analyses, la pureté de ses lignes, la solidité de scs assises la rendent plus accessible à l’esprit moderne que la théologie morale des siècles derniers, qu’une vue trop courte a souvent cantonnée dans les problèmes de détails de préférence aux thèses maîtresses garantissant la solidité de l’ensemble.

Mais il ne suffira pas de répéter la Somme, d’en gloser les textes. Les mots ne peuvent nous transmettre par eux-mêmes la réalité vivante qu’ils signifient. Les textes thomistes ne nous deviendront pleinement significatifs que si nous retrouvons personnellement, dans la foi, le Dieu qui inspira saint Thomas et que personne ne découvrira jamais à notre place.

(Le renouveau de la morale, Servais Pinkaers, Téqui, 1964, p. 25)

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