Jean de la Croix - Vive flamme d'amour (poème)

 

Original espagnol Très belle traduction ancienne du
p. Cyprien de la Nativité de la Vierge (1605-1680)
Traduction de
mère Marie du saint sacrement,
1990

¡Oh llama de amor viva,
que tiernamente hieres
de mi alma en el más profundo centro!
pues ya no eres esquiva,
acaba ya si quieres;
rompe la tela de este dulce encuentro.

¡Oh cauterio suave!
¡Oh regalada llaga!
¡Oh mano blanda! ¡Oh toque delicado,
que a vida eterna sabe1
y toda deuda paga!,
matando muerte en vida la has trocado.

¡Oh lámparas de fuego
en cuyos resplandores
las profundas cavernas del sentido
que estaba oscuro y ciego
con extraños primores
calor y luz dan junto a su querido!

¡Cuán manso y amoroso
recuerdas en mi seno
donde secretamente solo moras
y en tu aspirar sabroso
de bien y gloria lleno
cuán delicadamente me enamoras!

O flamme vive d'amour
Qui navres avec tendresse
De mon âme le centre le plus secret,
N'ayant plus nulle rigueur, 
Achève si tu le veux, 
Brise la toile de ce rencontre heureux.

O cautère délectable, 
O caressante blessure, 
O flatteuse main, ô touche délicate
Qui sens la vie éternelle
Et qui payes toute dette,
En tuant, de la mort tu as fait la vie.

O flambeaux de feu, ô vous
Dans les splendeurs éclatantes
De qui, les profondes cavernes du sens
Obscur jadis et aveugle,
En d'étranges excellences
Chaleur et lumière donnent à l'Ami.

Combien doux et amoureux
T'éveilles-tu dans mon sein
Où dans le secret tu fais seul ton séjour.
En ton souffle savoureux
Riche de gloire et de bien
Combien délicatement tu m'énamoures !

O flamme d'amour, vive flamme,
Qui me blesses si tendrement
Au plus profond centre de l’âme !
Tu n'es plus amère à présent,
Achève donc, si tu le veux ;
Romps enfin le tissu de cet assaut si doux !

O cautère vraiment suave !
O plaie toute délicieuse !
O douce main ! touche légère,
Qui a le goût d'éternité.
Par toi toute dette est payée !
Tu me donnes la mort : en vie elle est changée.

O lampes de feu très ardent,
Au sein de vos vives splendeurs
Mon sens avec ses profondeurs.
Auparavant aveugle et sombre,
En singulière excellence
Donne à la fois chaleur, lumière au Bien-Aimé !

Et combien doux et combien tendre
Tu te réveilles dans mon sein,
Où seul en secret tu demeures !
Par ta douce spiration.
Pleine de richesse et de gloire.
Combien suavement tu m'enivres d'amour.

 ---

1. Litt. : "qui de la vie éternelle a le goût".

  • Dernière mise à jour le .