Servais Pinkaers - Les anciens ont dit bien des choses mieux que nous
... Au cours de ce travail de rénovation de la théologie morale, nous nous apercevrons souvent que nos pères avaient déjà dit bien des choses qui nous paraissent neuves, qu’ils les avaient exprimées mieux que nous ne pourrions le faire. Nous redécouvrirons alors le sens véritable des textes anciens que nous n’avons pas compris parce que leur mode de pensée et leur langage n’étaient pas les nôtres, du fait de leur appartenance à une culture que nous avons tendance à considérer comme morte. Mais si nous apprenons ce qu’on peut appeler la commune mesure de toute pensée chrétienne, sa dimension surnaturelle, nous pourrons percevoir le sens profond des textes chrétiens en saisissant, à partir des mots d’autrefois, la signification vivante que leur conféraient les anciens.
Dans cette perspective, il nous paraît que le modèle qui s’impose à la théologie morale est encore saint Thomas d’Aquin, et notamment sa Somme de Théologie. La puissante structure de cette œuvre, l’étonnante pénétration de ses analyses, la pureté de ses lignes, la solidité de scs assises la rendent plus accessible à l’esprit moderne que la théologie morale des siècles derniers, qu’une vue trop courte a souvent cantonnée dans les problèmes de détails de préférence aux thèses maîtresses garantissant la solidité de l’ensemble.
Mais il ne suffira pas de répéter la Somme, d’en gloser les textes. Les mots ne peuvent nous transmettre par eux-mêmes la réalité vivante qu’ils signifient. Les textes thomistes ne nous deviendront pleinement significatifs que si nous retrouvons personnellement, dans la foi, le Dieu qui inspira saint Thomas et que personne ne découvrira jamais à notre place.
(Le renouveau de la morale, Servais Pinkaers, Téqui, 1964, p. 25)
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