Alain - Rien ne rend aussi sot que de vouloir plaire

Rien ne rend aussi sot que de vouloir plaire ; et rien ne rend injuste comme l'attention qui s'exerce sur de nouveaux amis. (Alain, Éléments de philosophie, 1916, VII, 1).

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Aristote - L'ami me fait mieux penser et mieux agir

"L'amitié d'ailleurs est un secours aux jeunes gens, pour les préserver de l'erreur ; aux vieillards, pour leur assurer des soins et suppléer à leur manque d'activité dû à la faiblesse ; à ceux enfin qui sont dans la fleur de l'âge (ἐν ἀκμῇ), pour les inciter aux nobles belles actions (τὰς καλὰς πράξεις) : "Quand deux vont de compagnie..." (Homère), car on est alors plus capable à la fois de penser (νοῆσαι) et d'agir (πρᾶξαι)." (Ethique à Nicomaque, VIII, 1, 1155a, Ed. Tricot, p. 382)

... τοῖς τ᾽ ἐν ἀκμῇ πρὸς τὰς καλὰς πράξεις: “σύν τε δύ᾽ ἐρχομένω:” καὶ γὰρ νοῆσαι καὶ πρᾶξαι δυνατώτεροι.

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Claire d'Assise : demeurez les amies de vos âmes

Demeurez toujours les amies de Dieu, les amies de vos âmes et de toutes vos sœurs, et soyez toujours attentivement fidèles aux promesses que vous avez faites au Seigneur.

Cité in Mary Beth Ingham, Initiation à la pensée de Duns Scot, 2009, p. 147

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Gabriel Marcel - Sartre ne dit rien sur l'amitié

En ce qui concerne le nous-sujet authentique, celui de l’amour ou de l’amitié, il faut avouer que la pensée de Sartre se révèle radicalement agnostique, voire nihiliste. (L’Existence et la liberté humaine chez Jean-Paul Sartre, Paris, Vrin, 1981, p. 69, cité in « Revue de la BNF » 2014/3 n° 48, p. 60).

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Gabriel Marcel - Sartre ne dit rien sur l'amour

A l’origine, j’ai honte devant tel être déterminé qui a pour moi un prestige, qui a sur moi un ascendant ; devant un esclave traité comme esclave, sans doute n’aurais-je aucunement honte. On prétendra peut-être que si la honte ici fait défaut, c’est que l’esclave n’est pas réel­lement considéré comme quelqu’un d’autre : mais jus­ tement pourquoi ne l’est-il pas ? Il me regarde pour­ tant, lui aussi. Ne serait-ce pas que l’altérité dans sa pureté est chargée d’une valeur que l’analyse paraît ici ignorer ? Là est sans doute la raison pour laquelle nulle part, semble-t-il, l’auteur ne parvient, je ne dis pas même à rendre compte de l’amour, mais à le pen­ser, alors que sur la sexualité, et particulièrement sur la caresse, il apporte les précisions les plus perti­nentes. On pourrait dire que sa pensée prend d’autant plus de force, de corps, qu’elle s’appuie elle-même davantage sur le corps, (Homo viator, Association Présence de Gabriel Marcel, 1998, p. 234).

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Jean de la Croix - Vive flamme d'amour (poème)

 

Original espagnol Très belle traduction ancienne du
p. Cyprien de la Nativité de la Vierge (1605-1680)
Traduction de
mère Marie du saint sacrement,
1990

¡Oh llama de amor viva,
que tiernamente hieres
de mi alma en el más profundo centro!
pues ya no eres esquiva,
acaba ya si quieres;
rompe la tela de este dulce encuentro.

¡Oh cauterio suave!
¡Oh regalada llaga!
¡Oh mano blanda! ¡Oh toque delicado,
que a vida eterna sabe1
y toda deuda paga!,
matando muerte en vida la has trocado.

¡Oh lámparas de fuego
en cuyos resplandores
las profundas cavernas del sentido
que estaba oscuro y ciego
con extraños primores
calor y luz dan junto a su querido!

¡Cuán manso y amoroso
recuerdas en mi seno
donde secretamente solo moras
y en tu aspirar sabroso
de bien y gloria lleno
cuán delicadamente me enamoras!

O flamme vive d'amour
Qui navres avec tendresse
De mon âme le centre le plus secret,
N'ayant plus nulle rigueur, 
Achève si tu le veux, 
Brise la toile de ce rencontre heureux.

O cautère délectable, 
O caressante blessure, 
O flatteuse main, ô touche délicate
Qui sens la vie éternelle
Et qui payes toute dette,
En tuant, de la mort tu as fait la vie.

O flambeaux de feu, ô vous
Dans les splendeurs éclatantes
De qui, les profondes cavernes du sens
Obscur jadis et aveugle,
En d'étranges excellences
Chaleur et lumière donnent à l'Ami.

Combien doux et amoureux
T'éveilles-tu dans mon sein
Où dans le secret tu fais seul ton séjour.
En ton souffle savoureux
Riche de gloire et de bien
Combien délicatement tu m'énamoures !

O flamme d'amour, vive flamme,
Qui me blesses si tendrement
Au plus profond centre de l’âme !
Tu n'es plus amère à présent,
Achève donc, si tu le veux ;
Romps enfin le tissu de cet assaut si doux !

O cautère vraiment suave !
O plaie toute délicieuse !
O douce main ! touche légère,
Qui a le goût d'éternité.
Par toi toute dette est payée !
Tu me donnes la mort : en vie elle est changée.

O lampes de feu très ardent,
Au sein de vos vives splendeurs
Mon sens avec ses profondeurs.
Auparavant aveugle et sombre,
En singulière excellence
Donne à la fois chaleur, lumière au Bien-Aimé !

Et combien doux et combien tendre
Tu te réveilles dans mon sein,
Où seul en secret tu demeures !
Par ta douce spiration.
Pleine de richesse et de gloire.
Combien suavement tu m'enivres d'amour.

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1. Litt. : "qui de la vie éternelle a le goût".

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Jean de la Fontaine

  • La délicatesse de celui qui aime (vraiment)

Qu'un ami véritable est une douce chose !
Il cherche vos besoins au fond de votre coeur ;
Il vous épargne la pudeur
De les lui découvrir vous-même.
Un songe, un rien, tout lui fait peur
Quand il s'agit de ce qu'il aime.

(Les deux amis)

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Joseph Ratzinger - L'amitié avec le Christ nous ouvre à tout ce qui est bon et nous donne le critère permettant de discerner entre le vrai et le faux, entre imposture et vérité

En quoi consiste le fait d'être des enfants dans la foi ? Saint Paul répond : "Ainsi nous ne serons plus des enfants, nous ne nous laisserons plus ballotter et emporter à tout vent de la doctrine" (Ep 4, 14). Une description très actuelle !

Combien de vents de la doctrine avons-nous connus au cours des dernières décennies, combien de courants idéologiques, combien de modes de la pensée... La petite barque de la pensée de nombreux chrétiens a été souvent ballottée par ces vagues - jetée d'un extrême à l'autre : du marxisme au libéralisme, jusqu'au libertinisme ; du collectivisme à l'individualisme radical ; de l'athéisme à un vague mysticisme religieux ; de l'agnosticisme au syncrétisme et ainsi de suite. Chaque jour naissent de nouvelles sectes et se réalise ce que dit saint Paul à propos de l'imposture des hommes, de l'astuce qui tend à les induire en erreur (cf. Ep 4, 14). Posséder une foi claire, selon le Credo de l'Eglise, est souvent défini comme du fondamentalisme. Tandis que le relativisme, c'est-à-dire se laisser entraîner "à tout vent de la doctrine", apparaît comme l'unique attitude à la hauteur de l'époque actuelle. L'on est en train de mettre sur pied une dictature du relativisme qui ne reconnaît rien comme définitif et qui donne comme mesure ultime uniquement son propre ego et ses désirs.

Nous possédons, en revanche, une autre mesure : le Fils de Dieu, l'homme véritable. C'est lui la mesure du véritable humanisme. Une foi "adulte" ne suit pas les courants de la mode et des dernières nouveautés ; une foi adulte et mûre est une foi profondément enracinée dans l'amitié avec le Christ. C'est cette amitié qui nous ouvre à tout ce qui est bon et qui nous donne le critère permettant de discerner entre le vrai et le faux, entre imposture et vérité. Cette foi adulte doit mûrir en nous, c'est vers cette foi que nous devons guider le troupeau du Christ. Et c'est cette foi, - cette foi seule - qui crée l'unité et qui se réalise dans la charité. Saint Paul nous offre à ce propos - en contraste avec les tribulations incessantes de ceux qui sont comme des enfants ballotés par les flots - une belle parole : faire la vérité dans la charité, comme formule fondamentale de l'existence chrétienne. Dans le Christ, vérité et charité se retrouvent. Dans la mesure où nous nous rapprochons du Christ, la vérité et la charité se confondent aussi dans notre vie. La charité sans vérité serait aveugle ; la vérité sans charité serait comme "cymbale qui retentit" (1 Co 13, 1).

(Extrait de l'homélie de la messe pour l'élection du pontife romain, 18 avril 2005 : https://www.vatican.va/gpII/documents/homily-pro-eligendo-pontifice_20050418_fr.html)


1. -- D'où l'importance del a vie contemplative dans l'Eglise.

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