Gabriel Marcel - Sartre ne dit rien sur l'amour

A l’origine, j’ai honte devant tel être déterminé qui a pour moi un prestige, qui a sur moi un ascendant ; devant un esclave traité comme esclave, sans doute n’aurais-je aucunement honte. On prétendra peut-être que si la honte ici fait défaut, c’est que l’esclave n’est pas réel­lement considéré comme quelqu’un d’autre : mais jus­ tement pourquoi ne l’est-il pas ? Il me regarde pour­ tant, lui aussi. Ne serait-ce pas que l’altérité dans sa pureté est chargée d’une valeur que l’analyse paraît ici ignorer ? Là est sans doute la raison pour laquelle nulle part, semble-t-il, l’auteur ne parvient, je ne dis pas même à rendre compte de l’amour, mais à le pen­ser, alors que sur la sexualité, et particulièrement sur la caresse, il apporte les précisions les plus perti­nentes. On pourrait dire que sa pensée prend d’autant plus de force, de corps, qu’elle s’appuie elle-même davantage sur le corps, (Homo viator, Association Présence de Gabriel Marcel, 1998, p. 234).

Amour, Amitié, Sartre, Altérité