Alain - Contre les systèmes philosophiques

Les hommes qui veulent sincèrement penser ressemblent souvent au ver à soie, qui accroche son fil à toutes choses autour de lui, et ne s’aperçoit pas que cette toile brillante devient bientôt solide, et sèche, et opaque, qu’elle voile les choses, et que, bientôt, elle les cache ; que cette sécrétion pleine de riche lumière fait pourtant la nuit et la prison autour de lui ; qu’il tisse en fils d’or son propre tombeau, et qu’il n’a plus qu’à dormir, chrysalide inerte, amusement et parure pour d’autres, inutile à lui-même. Ainsi les hommes qui pensent s’endorment souvent dans leurs systèmes nécropoles ; ainsi dorment- ils, séparés du monde et des hommes ; ainsi dorment-ils pendant que d’autres déroulent leur fil d’or, pour s’en parer.
Ils ont un système, comme on a des pièges pour saisir et emprisonner. Toute pensée ainsi est mise en cage, et on peut la venir voir ; spectacle admirable ; spectacle instructif pour les enfants ; tout est mis en ordre dans des cages préparées ; le système a tout réglé d’avance. Seulement, le vrai se moque de cela. Le vrai est, d’une chose particulière, à tel moment, l’universel de nul moment. À le chercher, on perd tout système, on devient homme ; on se garde à soi, on se tient libre, puissant, toujours prêt à saisir chaque chose comme elle est, à traiter chaque question comme si elle était seule, comme si elle était la première, comme si le monde était né d’hier. Boire le Léthé, pour revivre (Alain, Vigiles de l’esprit, 1942, Avant propos. Discours prononcé par Alain à la distribution des prix du lycée Condorcet en juillet 1904).

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Aristote - La plupart des hommes politiques ne mérite pas vraiment cette appellation

La plupart des hommes (οἱ πολλοὶ) politiques ne mérite pas vraiment cette appellation (οὐκ ἀληθῶς τυγχάνουσι τῆς προσηγορίας), car ils ne sont pas des politiques selon le vrai (κατὰ τὴν ἀλήθειαν) : le politique est celui qui choisit les belles (τῶν καλῶν) actions pour elles-mêmes alors que la plupart des hommes choisissent cette vie pour l'argent et le profit. (Ethique à Eudème, I, 5, 1216a 22)

ἀλλ᾽ οἱ πολλοὶ τῶν πολιτικῶν οὐκ ἀληθῶς τυγχάνουσι τῆς προσηγορίας: οὐ γάρ εἰσι πολιτικοὶ κατὰ τὴν ἀλήθειαν: ὁ [25] μὲν γὰρ πολιτικὸς τῶν καλῶν ἐστι πράξεων προαιρετικὸς αὐτῶν χάριν, οἱ δὲ πολλοὶ χρημάτων καὶ πλεονεξίας ἕνεκεν ἅπτονται τοῦ ζῆν οὕτως.

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François Noudelmann - Quand le philosophe proclame sa défaite à l'égard du vrai

Que Sartre ait été sincère ou non importe beaucoup moins que la tension entre ses différents moi, ses désirs et ses devoirs, les représentations contrastées de lui-même dans ses rapports aux autres. La morale kantienne dût-elle en souffrir, l’intention des individus demeure insondable et peu importe qu’elle soit bonne ou mauvaise, car nous ne connaissons jamais vraiment les raisons qui nous poussent à agir. Seul l’acharnement continuel de Sartre à traquer sa mauvaise foi nous conduit à penser qu’il ne fut pas un tricheur cynique, mais là n’est pas la question. Quant à la pertinence et à la vérité de ses analyses politiques, elles relèvent aussi d’un autre débat pour savoir si Sartre a eu tort ou raison, ou s’il a eu raison d’avoir eu tort. Les critères de vérité changent avec les époques et les jugements rétrospectifs n’échappent pas aux partis pris. (Un autre Sartre, chap. Une autre politique de l'existence, Gallimard, 2020)

Incroyable défaite d’une philosophie de la liberté ! Ils ont complètement perdu de vue qu’il était possible de suffisament se dégager du conditionnement pour saisir la fin et ainsi commencer d’être libre !

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Joseph Ratzinger - A propos du volontarisme, quand B. XVI rattrape Duns Scot par les bretelles !

Enfin, Duns Scot a développé un point à l’égard duquel la modernité est très sensible. Il s’agit du thème de la liberté et de son rapport avec la volonté et avec l’intellect. Notre auteur souligne la liberté comme qualité fondamentale de la volonté, en commençant par un raisonnement qui valorise le plus la volonté. Malheureusement, chez des auteurs qui ont suivi le notre, cette ligne de pensée se développa dans un volontarisme en opposition avec ce qu’on appelle l’intellectualisme augustinien et thomiste. Pour saint Thomas d’Aquin, qui suit saint Augustin, la liberté ne peut pas être considérée comme une qualité innée de la volonté, mais comme le fruit de la collaboration de la volonté et de l’intellect. Une idée de la liberté innée et absolue — comme justement elle évolue après Duns Scot — située dans la volonté qui précède l’intellect, que ce soit en Dieu ou dans l’homme, risque en effet de conduire à l’idée d’un Dieu qui ne ne serait même pas lié à la vérité et au bien. Le désir de sauver la transcendance absolue et la différence de Dieu par une accentuation aussi radicale et impénétrable de sa volonté ne tient pas compte du fait que le Dieu qui s’est révélé en Christ est le Dieu «logos», qui a agi et qui agit rempli d’amour envers nous. Assurément, comme l’affirme Duns Scot dans le sillage de la théologie franciscaine, l’amour dépasse la connaissance et est toujours en mesure de percevoir davantage que la pensée, mais c’est toujours l’amour du Dieu « logos » (cf. Benoît XVI,Discours à Ratisbonne, Insegnamenti di Benedetto XVI, II [2006], p. 261; cf. ORLF n. 38du 19 septembre 2006). Dans l’homme aussi, l’idée de liberté absolue, située dans sa volonté, en oubliant le lien avec la vérité, ignore que la liberté elle-même doit être libérée des limites qui lui viennent du péché. De toute façon, la vision scotiste ne tombe pas dans ces extrêmes: pour Duns Scot un acte libre découle du concours d'un intellect et d'une volonté et s'il parle d'un « primat » de la volonté, il l'argumente exactement parce que la volonté suit toujours l'intellect.

[Le problème est là : pour Duns Scot la volonté ne suit pas réellement ce que lui apporte l'intellect (la connaissance de l'objet), cette connaissance ne sert que d'occasion, on pourrait parler d'occasionalisme. D.S. dit que volonté et intellect concourent à l'acte mais pas de manière égale, la volonté prime ; en effet, sans un objet particulier l'acte serait toujours le même, etc. Le bien connu ne détermine pas. Il n'y a pas au sens strict de rapport à la vérité de l'objet. L'acte est gouverné par l'affectio justiciae qui garantit la bonté de l'acte (comme Dieu garantit la vérité des idées chez Descartes).]

En m’adressant aux séminaristes romains — l’année dernière — je rappelais que « la liberté, à toutes les époques, a été le grand rêve de l’humanité, mais en particulier à l’époque moderne » (Discours au séminaire pontifical romain, 20 février 2009). Mais c’est précisément l’histoire moderne, outre notre expérience quotidienne, qui nous enseigne que la liberté n’est authentique et n’aide à la construction d’une civilisation vraiment humaine que lorsqu’elle est vraiment réconciliée avec la vérité. Si elle est détachée de la vérité, la liberté devient tragiquement un principe de destruction de l’harmonie intérieure de la personne humaine, source de la prévarication des plus forts et des violents, et cause de souffrance et de deuils. La liberté, comme toutes les facultés dont l’homme est doté, croît et se perfectionne, affirme Duns Scot, lorsque l’homme s’ouvre à Dieu, en valorisant la disposition à l’écoute de sa voix, qu’il appelle potentia oboedientialis: quand nous nous mettons à l’écoute de la Révélation divine, de la Parole de Dieu, pour l’accueillir, alors nous sommes atteints par un message qui remplit notre vie de lumière et d’espérance et nous sommes vraiment libres.

(Benoît XVI, Audience générale, Jean Duns Scot, 7 juillet 2010)

Benoît XVI aborde cette partie 3ème et dernière partie de son discours différemment. Sa défense de Duns Scot pour le distinguer des auteurs qui s'inspireront de lui peut aussi se lire comme une correction implicite de Duns Scot. Car Duns Scot est clairement volontariste, pas de manière aussi caricaturale que l'ont été Henri de Gand et P. de J. Olivi, mais volontariste quand même. Il affirme clairement d'autre part que Dieu aurait pu créer autrement qu'il ne l'a fait (ce que reprendront et Luther et Descartes). Cette affirmation conduira, de fait, au scepticisme que dénonce B.XVI., mais également à l'existentialisme sartrien d'une liberté créatrice toute puissante détachée de tout rapport à la vérité (Michel Foucauld et consorts). Benoît XVI tient donc une position très habile et très respectueuse des autres qualités de D.S. Il n'en reste pas moins qu'il le corrige "fraternellement" et il le fait avec la responsabilité de sa charge. A quel point est-il conscient de sa pirouette ? Difficile à dire mais gardons à l'esprit la dimension espiègle du personnage (cf. surprise de Peter Seewald à ce sujet). L'expression "de toute façon, la vision de Duns Scot ne tombe pas dans..." résonne comme une défense à contre-courant. En 2006 aussi Benoît XVI avait très précisément corrigé les courants issus de Duns Scot tout en tentant de préserver notre auteur.

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Joseph Ratzinger - Herméneutique de la continuité vs herméneutique de la rupture

  • Pour une bonne herméneutique de la réforme

Le dernier événement de cette année sur lequel je voudrais m'arrêter en cette occasion est la célébration de la conclusion du Concile Vatican II, il y a quarante ans. Ce souvenir suscite la question suivante :

  • Quel a été le résultat du Concile ?
  • A-t-il été accueilli de la juste façon ?
  • Dans l'accueil du Concile, qu'est-ce qui a été positif, insuffisant ou erroné ?
  • Que reste-t-il encore à accomplir ?

Personne ne peut nier que, dans de vastes parties de l'Eglise, la réception du Concile s'est déroulée de manière plutôt difficile, même sans vouloir appliquer à ce qui s'est passé en ces années la description que le grand Docteur de l'Eglise, saint Basile, fait de la situation de l'Eglise après le Concile de Nicée : il la compare à une bataille navale dans l'obscurité de la tempête, disant entre autres : "Le cri rauque de ceux qui, en raison de la discorde, se dressent les uns contre les autres, les bavardages incompréhensibles, le bruit confus des clameurs ininterrompues a désormais rempli presque toute l'Eglise en faussant, par excès ou par défaut, la juste doctrine de la foi..." (De Spiritu Sancto, XXX, 77 ; PG 32, 213 A ; SCh 17bis, p. 524). Nous ne voulons pas précisément appliquer cette description dramatique à la situation de l'après-Concile, mais quelque chose de ce qui s'est produit s'y reflète toutefois.

La question suivante apparaît : pourquoi l'accueil du Concile, dans de grandes parties de l'Eglise, s'est-il jusqu'à présent déroulé de manière aussi difficile ? Eh bien, tout dépend de la juste interprétation du Concile ou - comme nous le dirions aujourd'hui - de sa juste herméneutique, de la juste clef de lecture et d'application.

Les problèmes de la réception sont nés du fait que deux herméneutiques contraires se sont trouvées confrontées et sont entrées en conflit. L'une a causé de la confusion, l'autre, silencieusement mais de manière toujours plus visible, a porté et porte des fruits.

  • D'un côté, il existe une interprétation que je voudrais appeler "herméneutique de la discontinuité et de la rupture" ; celle-ci a souvent pu compter sur la sympathie des mass media, et également d'une partie de la théologie moderne.
  • D'autre part, il y a l'"herméneutique de la réforme", du renouveau dans la continuité de l'unique sujet-Eglise, que le Seigneur nous a donné ; c'est un sujet qui grandit dans le temps et qui se développe, restant cependant toujours le même, l'unique sujet du Peuple de Dieu en marche.

[Herméneutique de la discontinuité]

L'herméneutique de la discontinuité risque de finir par une rupture entre Eglise préconciliaire et Eglise post-conciliaire. Celle-ci affirme que les textes du Concile comme tels ne seraient pas encore la véritable expression de l'esprit du Concile. Ils seraient le résultat de compromis dans lesquels, pour atteindre l'unanimité, on a dû encore emporter avec soi et reconfirmer beaucoup de vieilles choses désormais inutiles. Ce n'est cependant pas dans ces compromis que se révélerait le véritable esprit du Concile, mais en revanche dans les élans vers la nouveauté qui apparaissent derrière les textes : seuls ceux-ci représenteraient le véritable esprit du Concile, et c'est à partir d'eux et conformément à eux qu'il faudrait aller de l'avant. Précisément parce que les textes ne refléteraient que de manière imparfaite le véritable esprit du Concile et sa nouveauté, il serait nécessaire d'aller courageusement au-delà des textes, en laissant place à la nouveauté dans laquelle s'exprimerait l'intention la plus profonde, bien qu'encore indistincte, du Concile. En un mot : il faudrait non pas suivre les textes du Concile, mais son esprit. De cette manière, évidemment, il est laissé une grande marge à la façon dont on peut alors définir cet esprit et on ouvre ainsi la porte à toutes les fantaisies. (...)

[Herméneutique de la réforme]

A l'herméneutique de la discontinuité s'oppose l'herméneutique de la réforme comme l'ont présentée tout d'abord le Pape Jean XXIII, dans son discours d'ouverture du Concile le 11 octobre 1962, puis le Pape Paul VI, dans son discours de conclusion du 7 décembre 1965. Je ne citerai ici que les célèbres paroles de Jean XXIII, dans lesquelles cette herméneutique est exprimée sans équivoque, lorsqu'il dit que le Concile "veut transmettre la doctrine de façon pure et intègre, sans atténuation ni déformation" et il poursuit : "Notre devoir ne consiste pas seulement à conserver ce trésor précieux, comme si nous nous préoccupions uniquement de l'antiquité, mais de nous consacrer avec une ferme volonté et sans peur à cette tâche, que notre époque exige... Il est nécessaire que cette doctrine certaine et immuable, qui doit être fidèlement respectée, soit approfondie et présentée d'une façon qui corresponde aux exigences de notre temps. En effet, il faut faire une distinction entre

  • le dépôt de la foi, c'est-à-dire les vérités contenues dans notre vénérée doctrine,
  • et la façon dont celles-ci sont énoncées, en leur conservant toutefois le même sens et la même  portée" (S. Oec. Conc. Vat. II Constitutiones Decreta Declarationes, 1974, pp. 863-865)

Source : https ://www.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/speeches/2005/december/documents/hf_ben_xvi_spe_20051222_roman-curia.html

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Joseph Ratzinger - L'amitié avec le Christ nous ouvre à tout ce qui est bon et nous donne le critère permettant de discerner entre le vrai et le faux, entre imposture et vérité

En quoi consiste le fait d'être des enfants dans la foi ? Saint Paul répond : "Ainsi nous ne serons plus des enfants, nous ne nous laisserons plus ballotter et emporter à tout vent de la doctrine" (Ep 4, 14). Une description très actuelle !

Combien de vents de la doctrine avons-nous connus au cours des dernières décennies, combien de courants idéologiques, combien de modes de la pensée... La petite barque de la pensée de nombreux chrétiens a été souvent ballottée par ces vagues - jetée d'un extrême à l'autre : du marxisme au libéralisme, jusqu'au libertinisme ; du collectivisme à l'individualisme radical ; de l'athéisme à un vague mysticisme religieux ; de l'agnosticisme au syncrétisme et ainsi de suite. Chaque jour naissent de nouvelles sectes et se réalise ce que dit saint Paul à propos de l'imposture des hommes, de l'astuce qui tend à les induire en erreur (cf. Ep 4, 14). Posséder une foi claire, selon le Credo de l'Eglise, est souvent défini comme du fondamentalisme. Tandis que le relativisme, c'est-à-dire se laisser entraîner "à tout vent de la doctrine", apparaît comme l'unique attitude à la hauteur de l'époque actuelle. L'on est en train de mettre sur pied une dictature du relativisme qui ne reconnaît rien comme définitif et qui donne comme mesure ultime uniquement son propre ego et ses désirs.

Nous possédons, en revanche, une autre mesure : le Fils de Dieu, l'homme véritable. C'est lui la mesure du véritable humanisme. Une foi "adulte" ne suit pas les courants de la mode et des dernières nouveautés ; une foi adulte et mûre est une foi profondément enracinée dans l'amitié avec le Christ. C'est cette amitié qui nous ouvre à tout ce qui est bon et qui nous donne le critère permettant de discerner entre le vrai et le faux, entre imposture et vérité. Cette foi adulte doit mûrir en nous, c'est vers cette foi que nous devons guider le troupeau du Christ. Et c'est cette foi, - cette foi seule - qui crée l'unité et qui se réalise dans la charité. Saint Paul nous offre à ce propos - en contraste avec les tribulations incessantes de ceux qui sont comme des enfants ballotés par les flots - une belle parole : faire la vérité dans la charité, comme formule fondamentale de l'existence chrétienne. Dans le Christ, vérité et charité se retrouvent. Dans la mesure où nous nous rapprochons du Christ, la vérité et la charité se confondent aussi dans notre vie. La charité sans vérité serait aveugle ; la vérité sans charité serait comme "cymbale qui retentit" (1 Co 13, 1).

(Extrait de l'homélie de la messe pour l'élection du pontife romain, 18 avril 2005 : https://www.vatican.va/gpII/documents/homily-pro-eligendo-pontifice_20050418_fr.html)


1. -- D'où l'importance del a vie contemplative dans l'Eglise.

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Joseph Ratzinger - La liberté sans la vérité est un principe de destruction

Si elle est détachée de la vérité, la liberté devient tragiquement un principe de destruction de l’harmonie intérieure de la personne humaine, source de la prévarication des plus forts et des violents, et cause de souffrance et de deuils. 

(Benoît XVI, Audience générale, Jean Duns Scot, 7 juillet 2010)

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Marilyn Monroe - La vérité ne s'invente pas

La vérité peut seulement être retrouvée, jamais inventée, (Fragments, Points, 2022, cité dans Le Figaro Littéraire,  23 juin 2022, p. 9).

Marilyn aurait peut-être été intéressée de savoir que l'ancien sens du mot "inventer" était "découvrir". Le mot "retrouvée" a curieusement une connotation platonicienne, comme si Marilyn avait contemplé la vérité dans une vie antérieure et qu'il fallait la retrouver après l'avoir oubliée.

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Paul Valéry

Comment se peut-il que l'affaire de la liberté et du libre arbitre ait excité tant de passion et animé tant de disputes sans issue concevable ? C'est que l'on y portait sans doute un tout autre intéret que celui de d'acquérir une connaissance que l'on n'eut pas. On regardait aux conséquences. On voulait qu'une chose fut, et non point une autre ; les uns et les autres ne cherchaient rien qu'ils n'eussent déjà trouvé. C'est à mes yeux le pire usage que l'on puisse faire de l'esprit qu'on a. La Pléiade, Tome II, Fluctuations sur la liberté, p. 953

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Raymond Aron, les intellectuels voient quelque fois difficilement l'évidence

Albert Duroy

Comment expliquez-vous que de grands intellectuels, des hommes qui étaient réputés pour leur compréhension des choses du temps, se sont laissé mystifiés par le mythe soviétique, et surtout par le stalinisme, pendant si longtemps.

Raymond Aron

(...)

Vous me posez une question que je me suis posée à moi-même pendant si longtemps : est-il si difficile pour des grands intellectuels d'accepter que 2 et 2 font 4 et que le goulag, ce n'est pas la démocratie ?

(Raymond Aron, https://www.youtube.com/watch?v=JXSOlsb0V50)

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Saint Augustin, lorsque le débat est clos

La cause est entendue ; que l'erreur, à terme, prenne fin.

Causa finita est : utinam aliquando finiatur error.

(Saint Augustin, Psaume 131, in Oeuvres complètes, T. 17, 1872, p. 301a)

Ce passage a donné naissance à l'adage : Roma locuta, causa finita : Rome a parlé, le débat est clos.

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Sartre

J.-P. S. – Cette vérité je ne la connaissais pas encore tout entière, loin de là. Je ne la connaissais pas du tout. Mais je l'apprendrais au fur et à mesure. Je l'apprendrais moins en regardant le monde qu'en combinant les mots. En combinant les mots, j'obtiendrais des choses réelles. S. de B. – Comment ça ? C'est important. J.-P. S. – Eh bien ! je ne savais pas comment. Mais je savais que la combinaison des mots, ça donnait des résultats. On les combinait et puis il y avait des groupes de mots qui donnaient une vérité. S. de B. – Ça, je ne comprends pas très bien. J.-P. S. – La littérature consiste à grouper des mots les uns avec les autres : je ne m'occupais pas encore de la grammaire et de tout ça. On combine par l'imagination, c'est l'imagination qui crée des mots comme... « à rebrousse-soleil ». Parmi ces groupes de mots, certains étaient vrais.

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